En 2019, vous avez développé l’activité de chirurgie bariatrique (chirurgie de l’obésité) dans votre service. À qui s’adresse ce type d’intervention et comment s’organise cette prise en charge spécifique ?
Dr Alexandre Rault : La prévalence de l’obésité augmentant actuellement dans notre pays (15 % de la population adulte est obèse en France), nous constatons un véritable besoin de ce type de chirurgie pour les personnes touchées. Afin de prendre en charge nos patients de manière globale, nous avons choisi de développer cette activité à l’Hôpital Foch en nous entourant de tous les moyens nécessaires, grâce à l’apport d’une équipe pluridisciplinaire, avec des nutritionnistes, des diététiciens, des psychologues. Le parcours patient est de l’ordre de six mois entre la première consultation et l’intervention à proprement parler. La technique dite de « sleeve gastrectomie » est réservée aux patients présentant un IMC (indice de masse corporelle) supérieur à 40, ou supérieur à 35 avec une comorbidité associée à l’obésité, comme une hypertension artérielle, un diabète, ou encore des pathologies ostéoarticulaires. C’est l’intervention la plus pratiquée en France aujourd’hui. La technique repose sur une résection d’une partie de l’estomac et répond bien aux besoins de l’obésité morbide.
Dans les cas d’obésité très marquée, existe-t-il d’autres techniques chirurgicales ?
Dr Alexandre Rault : Nous utilisons en effet la technique du by-pass gastrique, consistant à diminuer l’estomac et à modifier le circuit alimentaire. Quant à l’anneau gastrique, on n’y recourt quasiment plus à l’heure actuelle en chirurgie de l’obésité. À la suite de ces différentes interventions, en particulier la sleeve gastrectomie et le by-pass, nous obtenons d’excellents résultats sur la perte de poids, très importante durant les premières années, l’objectif étant de perdre plus de 50 % de l’excès de poids de départ. Grâce à l’efficacité de ces chirurgies, nos patients retrouvent une vie normale et les comorbidités s’allègent nettement. En complément de ces opérations, nous avons recours à la chirurgie plastique, puisque la perte de poids entraîne en général un relâchement du tissu sous-cutané. Nous pratiquons en particulier des body-lift, chirurgies permettant de retendre les tissus et d’éliminer les excès de peau.
Une consultation de proctologie a également été ouverte récemment au sein du service de chirurgie digestive. Quelles sont les pathologies anales prises en charge ?
Dr Alexandre Rault : La proctologie est une spécialité consacrée essentiellement aux pathologies de l’anus et du rectum, prenant en charge, par exemple, des fissures anales, des abcès de la marge anale, des fistules anales, ou encore, le plus fréquemment, des hémorroïdes. Dans un premier temps, le patient consulte le chirurgien proctologue. Ce dernier évalue la maladie anale, et, en fonction de la gravité de la pathologie ou de ses différents stades, peut proposer soit un traitement médical à base de pommades ou de soins locaux, soit un traitement chirurgical grâce notamment à des techniques nouvelles. Pour soigner les hémorroïdes, par exemple, nous utilisons un procédé innovant appelé « méthode THD », c’est-à-dire des ligatures des veines et vaisseaux hémorroïdaux par doppler. Ce traitement chirurgical mini-invasif permet de diminuer les complications postopératoires et d’obtenir à la fois des suites beaucoup plus simples et un rétablissement du patient bien plus rapide. Enfin, en proctologie, nous traitons également la condylomatose anale (maladie sexuellement transmissible provoquée par le papillomavirus) et les autres pathologies spécifiques de l’anus.
L’Hôpital Foch vient de s’équiper d’un second robot chirurgical. Dans votre discipline, comment la technique chirurgicale employée est-elle choisie entre laparotomie et cœlioscopie ?
Dr Alexandre Rault : Aujourd’hui, en chirurgie digestive, la cœlioscopie (accès via de petites incisions) s’est fortement démocratisée et est devenue la référence absolue pour beaucoup d’opérations. En effet, cette technique représente la voie d’abord la plus recommandée et nous la privilégions toujours, y compris pour les opérations lourdes comme les chirurgies du côlon, du pancréas et du foie. Cette cœlioscopie permet en outre une récupération et une réhabilitation du patient beaucoup plus rapides que la laparotomie (accès direct par ouverture).
Depuis peu, le robot a fait son apparition dans notre spécialité, permettant notamment d’accéder à des régions où la cœlioscopie rendait les opérations difficiles, comme, par exemple, la zone du pelvis pour la chirurgie du rectum, ou du pancréas. Le robot constitue donc aujourd’hui un outil facilitant les interventions chirurgicales de cœlioscopie. Il n’a pas encore été montré sur le plan scientifique de bénéfices propres à la chirurgie robotique ; néanmoins, nous percevons d’ores et déjà une nette amélioration des suites postopératoires et la préservation de certains éléments du corps au rôle fondamental, comme les nerfs érecteurs chez l’homme.
Vous êtes le premier chirurgien français à avoir réalisé des podcasts (programmes audio) proposant de l’information médicale, afin de permettre à vos patients de se préparer aux interventions chirurgicales (cure de hernie, ablation de la vésicule, chirurgie de la thyroïde…). Qu’est-ce que ce nouveau mode de communication apporte aux patients comme aux chirurgiens ?
Dr Alexandre Rault : Proposer de l’information médicale par l’audio, en complément de la consultation et des fiches d’information, instaure une certaine proximité avec les patients, ce qui favorise la relation de confiance et réduit l’anxiété. C’est un outil moderne, accessible chez soi ou partout ailleurs de façon libre et illimitée, qui apporte une dimension empathique et rassurante à l’information par le biais de la voix. En outre, grâce au podcast médical, les patients retiennent mieux les explications. C’est un facteur précieux pour capter la compréhension et l’adhésion des patients sur leur prise en charge. Sur le site internet de l’Hôpital Foch, on retrouve par exemple deux types de podcasts : l’un, « Parcours patient », où j’aborde la préparation à la chirurgie (conseils, recommandations), le déroulement et les suites de différentes interventions chirurgicales, et l’autre, « Questions/Réponses », dans lequel je réponds aux questions que se posent les patients sur l’après (alimentation, reprise du transit, signes de complications, gestion des douleurs, pratique sportive, etc.). Le podcast devient ainsi, pour nous, chirurgiens, une nouvelle façon de communiquer auprès de nos patients.